Après trois décennies d'immigration turque en Europe et soixante-quinze ans de modernité kémaliste, la famille turque en migration se devrait d'être conforme au modèle de la famille nucléaire occidentale. Ainsi, les mariages arrangés, la séparation des sexes et la forte patrilinéarité ne seraient plus que de «mauvais souvenirs». Pourtant, si l'on examine aujourd'hui comment s'élabore le champ de la parenté en situation migratoire, la surprise est totale. Les modèles anciens hérités des tribus nomades turques perdurent. La rupture radicale avec les ordres anciens ne semble pas être de mise. Tout se passe comme si se produisait un retour des schèmes traditionnels réactivés par la situation migratoire. Cet article se propose donc d'étudier dans le cadre de la parenté, quels vont être les repères dominants en migration. (Résumé de la revue)
Pour illustrer le thème de l'infanticide et du déni total de grossesse, l'auteur propose certaines vignettes cliniques notamment celle d'une adolescente issue d'une famille kabyle vivant en France et celle d'une jeune Haitienne de onze ans vivant en Guyane..
Dans les sociétés patriarcales du Maghreb, le rôle maternel est, pour les femmes, exclusif de tout autre. Mais engendrer n'est que porter et laisser Dieu faire croître l'enfant, tandis que la véritable maternité consiste après sa naissance à le nourrir. L'importance de l'allaitement est si grande qu'il établit entre nourrice et nourrisson une quasi filiation dans une société où pourtant les femmes sont exclues de la grande famillle patrilignagère qui ne comporte que les hommes. Ainsi l'allaitement paraît conférer aux nourrices une forme de contre-pouvoir.
La violence d'Etat sur l'héritage anthroponimique peut s'exercer par la nationalisation des prénoms et patronymes afin de gommer toute trace allochtone ou par la stigmatisation des patronymes associés à des identités disqualifiées. Les francisations des noms obtenues dans les années soixante-dix et quatre-vingt à l'occasion de la naturalisation des Arméniens venus du Proche-Orient, concernent tout particulièrement des patronymes turquisés. Auparavant, ceux qui changaient de nom étaient traités avec mépris par leur communauté, tandis qu'avec la reconnaissance officielle du génocide arménien, les attitudes ont changées.
L'augmentation des mariages mixtes depuis 1984 concerne d'abord les Algériens et les Marocains, avant les Portugais et les Espagnols, et les femmes avant les hommes ; ils sont plus soumis au divorce que les couples non mixtes. Parce qu'il favorise l'acculturation des deux partenaires, le mariage mixte est un indicateur d'intégration ou d'assimilation à nuancer ou à étudier davantage, notamment à partir de la filiation ou de la conscience identitaire des enfants dont le métissage conduit à la fois à un processus de francisation et à la fois d'affaiblissement de l'identité nationale.
Radicalement différente de la politique d'immigration, la politique de naturalisation est un produit de l'histoire de France, de sa conception de l'identité nationale et du droit de la nationalité qui mélange droit du sol, choix d'une terre et d'une nation et droit du sang par la filiation. Le socle juridique, établi par le code de 1945, spécifique aux Français a évolué paisiblement jusqu'en 1984 où il a commencé à faire l'objet de débats polémiques publiques jusqu'à aboutir à la réforme de la procédure d'acquisition de la nationalité en 1993 puis à son atténuation en 1998. Cette politique d'intégration nationale ouvre une réflexion sur la citoyenneté en Europe.
Dans une société soumise à des changements nombreux , le nom et le prénom sont des pivots qui permettent au sujet d'être reconnu dans sa singularité par rapport à sa filiation. La mise au jour des différentes appartenances et la distinction entre les différentes filiations nécessite une grande exactitude dans la manière dont on raconte les généalogies. Selon l'auteur, il importe que les descendants puissent déceler le "fil rouge" qui fonde les appartenances (mais pas forcément les affinités) pour que les repères des sujets soient clairs.
Guide d'information réalisé par le ministère de la Justice traitant de la nationalité française, par naissance, par filiation, par adoption, par mariage, par naturalisation, ainsi que des adresses utiles.
Suite au référendum d'autodétermination (décembre 1974) aux îles Comores, l'île de Mayotte a entamé un processus de rapprochement avec la France. Dans ce cadre nouveau, s'est posée la question des noms des personnes. Si l'administration locale considère l'affaire un enjeu de nature pratique, les Mahorais s'intéressent aux changements au sein de la famille ainsi qu'à la question de l'islam et aux relations interethniques avec les autres îles comoriennes. La question des noms de personne demeure dans l'incertitude, à l'image même du statut de l'île, toujours en attente de régularisation constitutionnelle.
L'état civil colonial a essayé de briser le nom en tant que support symbolique crucial de l'organisation communautaire algérienne, en s'attaquant au patrimoine individuel ainsi qu'à sa valeur transmise. Si la finalité d'un nom est d'énoncer la constance sociale de chacun, sa création ainsi que son avenir dépendent de multiples déterminant subjectifs et intersubjectifs qui alimentent les langues au cours de l'histoire.
Article présentant les différents critères d'attribution de nationalité, droit du sol, filiation, situation matrimoniale et résidence. En France, si l'on ne naît pas Français, on le devient par mariage, par naturalisation ou par une manifestation positive de volonté : l'acquisition de nationalité. Quant à la notion de Multiculturalisme, son usage est aujourd'hui préféré à celui d'acculturation (très en vogue dans les années soixante-dix) et succède à l'assimilation dans la mesure où on ne peut concevoir aujourd'hui l'intégration des populations étrangères sans respecter leurs différences culturelles.
En France, à l'avènement de la IIIe République s'achève la généralisation de l'état civil et l'immutabilité des noms de famille. Elle concerne tous les citoyens français en métropole et Outre-mer et doit être étendue aux populations des colonies. Un des aspect de la dépendance coloniale dans les départements de l'Algérie française a été l'imposition du système patronymique. Ce texte analyse les conditions de sa genèse et ses liens avec les processus d'affirmation identitaire contemporains en France. Les immigrés d'origine algérienne semblent manifester eux-mêmes un grand attachement pour un patronyme qui n'a ni la profondeur historique ni l'authenticité supposées. La continuité dans le choix de prénoms arabo-musulmans pour les nouveaux-nés dans l'Hexagone implique une volonté de démarquage ainsi que la volonté de donner des gages de fidélité aux nationaux restés au pays et une garantie contre la tentation de l'oubli des siens.
L'ensemble des questionnements sur la capacité d'intégration "à la française" du début des années quatre-vingt a conduit en 1993 au vote de la loi Méhaignerie. Dans ce travail, l'auteur s'est efforcé de montrer que si les migrations obligent à des recompositions identitaires, les identités nationales doivent être appréhendées comme des processus nés de dynamiques historiques, de rapports de force et de sens, en relation aux conditions économiques, politiques et sociales. Ces processus favorisent la production de catégories où se conjuguent des aspects juridiques, territoriaux, linguistiques ainsi que la mémoire réinventée dans le sens d'un imaginaire national. Ce texte rend compte d'une enquête de terrain sur l'imaginaire national d'hommes et de femmes issus de l'immigration algérienne en France. L'auteur a abordé les conduites et les interactions des sujets en relation au contexte social et familial - fait de négociations et de compromis tout particulièrement au sujet des projets matrimoniaux, des pratiques religieuses et langagières, du respect des interdits alimentaires et de leur transmission.
Analyse des conséquences de la loi du 5 juillet 1996 relative à l'adoption en France au regard de sa conformité au droit international et de la convention internationale de la Haye du 29 octobre 1993. Parce qu'elle est au coeur de conflits de lois et fait intervenir des règles de droit international, privé ou de droits de l'enfant et que l'adoption plénière entraîne une rupture des liens filiaux, cette démarche qui impose un agrément obligatoire et des choix individuels vis-à-vis des adoptés pose aux parents des questions qui dépassent le cadre juridique de la filiation et oblige à concevoir la transmission comme une donnée interactive entre adoptants et adoptés.
Textes d'analyse et entretiens qui présentent quelques facettes de la situation du père émigré-immigré et des jeunes pères franco-maghrébins dans l'exercice de leur paternité, dans leur relation avec la justice des mineurs, ainsi que de l'évolution de la fonction paternelle chez les Africains, les Turcs ou les Asiatiques en France.