A partir des matériaux recueillis dans le cadre d'une enquête de l'INSEE et par les sociologues de l'Université Bordeaux-II sur le quartier des Hauts-de-Garonne, l'auteur propose une définition sociologique de ce que l'on nomme aujourd'hui les "classes populaires". En dehors de petites enclaves localisées, les habitants des Hauts-de-Garonne ne forment pas une underclass marginalisée, un autre monde dans lequel s'accumulent toutes les difficultés sociales. En ce sens, la réputation dont souffre ce quartier n'est pas fondée. Cependant il reste que cette réputation pèse sur des individus et des familles qui adhèrent très largement aux modèles culturels des classes moyennes et de la culture de masse. Le sentiment de chute, de pauvreté relative, de fragilité s'impose à près de la moitié de la population. Ce n'est pas le cadre de vie qui pose un problème, il s'agit plutôt de la situation sociale stigmatisée des personnes appartenant aux classes moyennes prolétarisées et dépendantes. L'auteur met en exergue dans quelle mesure la définition de soi bloque la formation d'une culture et d'une communauté populaires quand chacun se range et cherche à se démarquer des autres dans un mécanisme de ségrégation auto-produit. Ceux qui développent des liens plus communautaires sont souvent rejetés parce qu'ils participent de la stigmatisation du quartier, même quand celle-ci est décrite comme injuste.