L'article esquisse une caractérisation du régime de marginalité urbaine qui a émergé dans les sociétés avancées à compter de la fin de l'ère fordiste, et met en lumière les quatre logiques qui se combinent pour la produire : une dérive macrosociétale des inégalités, la déprolétarisation et la précarisation du salariat, la rétraction de l'Etat providence, et la concentration-stigmatisation territoriales de la pauvreté. Il montre également que l'émergence de cette nouvelle marginalité prend en Europe des formes distinctes de celles observées aux Etats-Unis. (résumé de la revue)
En découvrant les soubassements matériels et en démontant les ressorts de la " pensée unique sécuritaire " qui sévit aujourd'hui partout en Europe, et singulièrement en France, ce livre pointe les voies possibles d'une mobilisation civique visant à sortir du programme répressif qui conduit les élites politiques à se servir de la prison comme d'un aspirateur social chargé de faire disparaître les rebuts de la société de marché.
La très forte sur-représentation des étrangers dans les prisons d'Europe (comparable, sinon supérieure à celle des Noirs dans les pénitenciers d'Amérique), la multiplication des centres de rétention pour migrants en situation irrégulière, la redéfinition de l'immigration comme un problème de "sécurité", la diligence et la sévérité spéciales avec lesquelles la police et la justice traitent les personnes de type "non-européen", l'amalgame croissant, dans le discours politique et médiatique, entre immigration, illégalité et criminalité : la convergence de ces phénomènes autorise à parler d'un processus de criminalisation des immigrés en Europe, processus qui fait de l'étranger un "ennemi commode" - à la fois symbole et cible de toutes les anxiétés sociales (comme le sont les afro-américains des ghettos américains). La prison et le marquage qu'elle effectue participent activement à la fabrication d'une catégorie transeuropéenne de "sous-blancs" taillée sur mesure pour justifier une dérive vers la gestion pénale de la pauvreté qui tend à s'appliquer à l'ensemble des couches populaires minées par le chômage de masse et par l'emploi flexible. L'évolution des pratiques policières et de l'emprisonnement des étrangers, immigrés et assimilés offre ainsi un indicateur avancé du degré auquel l'Union européenne résiste ou se conforme à la politique américaine de pénalisation de la misère comme complément de la généralisation de l'insécurité salariale et sociale.
Dénonciation des «violences urbaines», quadrillage intensifié des quartiers dits sensibles, répression accrue de la délinquance des jeunes et harcèlement des sans-abri, couvre-feu et «tolérance zéro», gonflement continu de la population carcérale, surveillance punitive des allocataires d'aides : partout en Europe se fait sentir la tentation de s'appuyer sur les institutions policières et pénitentiaires pour juguler les désordres engendrés par le chômage de masse, l'imposition du salariat précaire et le rétrécissement de la protection sociale. Cet ouvrage retrace les voies par lesquelles ce nouveau «sens commun» punitif, élaboré en Amérique, s'est internationalisé. Il note combien les populations étrangères sont victimes de discriminations de par leur fragilité sur le marché du travail.
Après avoir défini la notion de "underclass urbaine" qui ne recouvre ni celle de "sous-prolétariat", ni "d'exclus", ni de "nouveaux pauvres", l'auteur étudie les usages du terme lié à la structure du marché du travail (niveau structural), à la conduite des individus (niveau comportemental), aux caractéristiques du quartier (niveau écologique).
Aperçu de la vie quotidienne des Noirs du quartier West-Side aux Etats-Unis (Chicago). L'insécurité, la dégradation des conditions de vie y sont spectaculaires. Dans ce ghetto, la violence et la peur se répandent et s'intensifient, les rapports sociaux se délitent, les aires de sociabilité se contractent et les institutions ne sont plus porteuses du sens de la citoyenneté.
Entre 1916-1930 un million et demi de Noirs Américains du Sud ont émigré vers le Nord des Etats-Unis. Cette migration est à l'origine de la structure dualiste de l'espace social américain où subsiste une ségrégation raciale presque totale. Le passage du Sud au Nord est celui d'une structure de domination raciale directe et personnalisée à un mode de domination structural, indirect et impersonnel, à l'origine du ghetto noir urbain, berceau et prison de la civilisation urbaine afro-américaine.
Analyse critique de l'ouvrage de SKOGAN W.G. intitulé «Disorder and Decline : crime and the spiral of Decay in American Neighborhoods» (Désordre et déclin : le crime et la spirale de la déchéance dans les quartiers américains). Cet ouvrage décrit le processus écologique et social de dégradation des quartiers en perdition, l'inadéquation des méthodes policières et les cercles vicieux de dégradation induits par l'éclatement ou le retrait de l'Etat. A la suite de cet article, vingt ouvrages sont succinctement analysés.
L'étude de l'exclusion sociale dans les centre-villes prend rarement en compte les changements structurels dans la société. L'accent est mis en général sur les caractéristiques individuelles des résidents du ghetto et sur la prétendue culture de pauvreté. Cet article propose une approche différente en étudiant les caractéristiques de la stratification sociale dans laquelle les résidents du ghetto évoluent. Pour ce faire, l'auteur compare la situation sociale et financière des Noirs qui vivent dans le ghetto aux Etats-Unis (Chicago) avec ceux qui résident dans les secteurs les plus pauvres de la ville. Il en ressort que la hausse du chômage et de l'exclusion économique associée à une restructuration spatiale et industrielle du capitalisme américain a déclenché un processus d'"hyper ghettoïsation".
L'étude sociologique comparée des structures et des mécanismes de l'exclusion urbaine en France et aux Etats-Unis permet l'examen critique de termes tels que banlieue et ghetto, aujourd'hui volontiers confondus dans le discours journalistique et politique. En s'appuyant sur des enquêtes et des monographies urbaines, l'auteur tente de déconstruire l'équation ethnicité-classe-espace en montrant que la convergence apparente de formes de déréliction sociale ne peut éluder la profonde différence des mécanismes de constitution et de reproduction de ces deux réalités sociospatiales.
Centré autour du livre «Immigrant America», l'auteur fait le point sur le débat américain autour de l'immigration aux Etats-Unis et bat en brèches un certain nombre de théories tombées dans le domaine commun : les immigrants n'arrivent pas nécessairement des pays les plus pauvres, l'acculturation n'est pas un remède simple aux traumas de l'immigration; à niveau social égal, le multilinguisme n'est pas un handicap pour les enfants de migrants; l'assimilation relève du mirage collectif; l'identité ethnique est avant tout une construction politique et médiatique.