Si les effets de structure restent décisifs, dans les localisations des familles maghrébines immigrées, ces populations ne sont pas entièrement déterminées par ces contraintes externes. Ainsi le vécu de l'habitat en pays d'arrivée ne peut se penser, pour les primo-arrivants, sans l'investissement affectif et économique au pays d'origine. Les choses changent avec le regroupement familial et les nécessaires concessions à l'intégration. Les tendances au communautarisme et l'autoperception d'étranger par les parents sont alors concurrencées par les velléités de relations transethniques portées par les enfants et leur volonté d'échapper à la trop grande emprise de la communauté. L'habitat est donc vécu en rapport avec ces moments contrastés du parcours migratoire. Le primo-arrivant l'occupe comme transitoire et accessoire en période de célibat, puis comme refuge domestique, protecteur, réapproprié avec les dispositions culturelles d'origine. Son descendant lui le vit comme centre d'une reconstruction identitaire originale et fera de la maison de retour une résidence secondaire, cependant signe d'une ascension sociale. (résumé de la publication)
La pratique de la ville affecte profondément la culture de la famille émigrée. Rapidement, l'exposition à l'espace public, les mots, les objets, les formes de consommation conjuguent leurs effets. Il en résulte l'hybridation des pratiques quotidiennes, urbaines et domestiques. La famille n'est plus la même du point de vue de sa composition mais aussi du point de vue de la répartition des pouvoirs, des identités et des positions relatives de ses membres. La maison du retour, envisagée comme terme d'un nomadisme résidentiel nécessaire, devient vite une résidence secondaire, appendice d'une résidence principale placée dans la périphérie d'une grande ville française. L'analyse de ces transformations est au centre de l'ouvrage. C'est le résultat d'une recherche collective menée sur plusieurs sites en France, mais aussi au Maghreb. L'ambition des auteurs est de renouveler la compréhension du rapport des "immigrés" de France à la société et à l'espace, à partir d'une étude ethno-sociologique.