Dans cet article, l'auteur non seulement étudie les modalités de reproduction des rapports sociaux de sexe dans les quartiers d'habitat social en France et les effets de genre dans l'analyse des violences que subissent les jeunes filles maghrébines en articulant espace public/espace privé, mais elle interroge les effets pervers d'une ethnicisation de certains phénomènes sociaux, ce qui comporte le risque de renforcer les représentations associées aux descendants de migrants par un double processus de naturalisation des violences des garçons et de victimisation des filles.; Après avoir examiné les espaces familiaux en mutation et l'identité masculine malmenée, l'auteur analyse l'appropriation masculine de l'espace public et les injonctions de genre et se demande si les quartiers sont un cadre propice à la construction des réputations. Les violences à l'encontre des jeunes filles maghrébines et l'insécurité les menent à adopter d'autres stratégies parmi lesquelles la visibilité ou l'invisibilité comme résistance à la domination (des garçons).
Les transformations de la société ont modifié la construction de l'identité sociale des jeunes. Penser la jeunesse aujourd'hui nécessite que la catégorie jeune et les politiques de la jeunesse soient réinterrogées au regard des évolutions de la société et que l'on se questionne sur ce que l'on doit transmettre pour aider les jeunes à prendre leur place.
Le constat d'un accroissement de la tension entre les sexes dans les quartiers populaires est aujourd'hui communément admis. L'ethnicisation renvoie pour les femmes issues majoritairement de l'immigration maghrébine à une image figée qui les cantonne dans le rôle de femmes soumises, dépendantes, à leur infériorisation sur le marché du travail.
Ce document a pour objet d'examiner les tentatives ou les volontés de dépassement des postures figées qui voudraient des garçons virils, machos et délinquants et des filles en phase de mobilité sociale ascendante (grâce à la réussite scolaire) et porteuses d'émancipation. A travers l'étude comparative entre les situations des hommes et des femmes, notamment celles d'origine maghrébine qui vivent dans les quartiers populaires, il s'agit de montrer comment leurs situations sont le produit de rapports sociaux multiples. L'enjeu de la réflexion engagée au départ de cette recherche est de parvenir à croiser les différentes analyses faites sur la question de genre, les études menées sur les quartiers et celles concernant les migrations. Ainsi la première partie étudie ce qui se joue dans la sphère privée des jeunes filles et garçons du quartier (transmissions familiales, conjugalité, sexualité), la deuxième partie explore la sphère publique du quartier (stratégies individuelles ou collectives), enfin, la troisième partie examine les stratégies au féminin et au masculin de résistance à la domination et aux injonctions de genre