Longtemps, le travail sur autrui, le travail consistant à éduquer, à former, à soigner, s'est inscrit dans ce que j'appelle un programme institutionnel : le professionnel, armé d'une vocation, appuyé sur des valeurs légitimes et universelles, mettait en oeuvre une discipline dont il pensait qu'elle socialisait et libérait les individus. Les contradictions de la modernité épuisent aujourd'hui ce modèle et les professionnels du travail sur autrui ont le sentiment d'être emportés par une crise continue et par une sorte de décadence irréversible. (Présentation de l'auteur)
Nos sociétés sont dominées par une contradiction fondamentale : sociétés démocratiques, elles affirment l'égalité par essence de tous les sujets ; sociétés capitalistes, elles ne cessent de construire des marchés qui hiérarchisent les compétences et les mérites. Cette contradiction semble de moins en moins maîtrisée. Comment concilier l'égalité de tous et le mérite de chacun ? On voit se former des mouvements sociaux qui en appellent à la reconnaissance des individus - indépendamment de leurs mérites - et d'une égalité de principe qui se retourne aisément en culpabilité, en mépris et en violence. En fait, tout en ne renonçant pas à la recherche de l'égalité, la double nature de nos sociétés exige que se forme une politique de reconnaissance du sujet. (4e de couverture)
Ensemble de contributions sur la violence des jeunes en France. Sont successivement abordés par les différents auteurs l'évolution de la délinquance et de la criminalité à partir de 1975, les caractéristiques des délinquants et le poids des générations issues de l'immigration dans les banlieues, ou dans l'émergence de bande de jeunes laquelle obéit à une logique de territoire et de revendication consumériste. Suit une analyse des violences à l'école, phénomène social accru par la massification du système scolaire et sa perte de légitimité aux yeux des élèves. Le numéro s'achève par les réponses à apporter à l'insécurité dans les stades et à la violence transmise par la télévision. Deux tableaux présentent les dernières mesures gouvernementales.
Le thème de la violence scolaire est aujourd'hui si envahissant qu'il en devient suspect. Son emprise est le révélateur d'une mutation profonde de l'école que ses acteurs ont du mal à percevoir autrement que sous l'angle de la crise. L'article s'efforce de montrer que cette violence procède de plusieurs logiques, qu'elle ne se réduit pas à l'envahissement de l'école par la violence sociale mais qu'elle répond aussi aux violences du système scolaire lui-même, violences issues du paradoxe d'une école de masse qui se veut à la fois démocratique et méritocratique.
A partir des matériaux recueillis dans le cadre d'une enquête de l'INSEE et par les sociologues de l'Université Bordeaux-II sur le quartier des Hauts-de-Garonne, l'auteur propose une définition sociologique de ce que l'on nomme aujourd'hui les "classes populaires". En dehors de petites enclaves localisées, les habitants des Hauts-de-Garonne ne forment pas une underclass marginalisée, un autre monde dans lequel s'accumulent toutes les difficultés sociales. En ce sens, la réputation dont souffre ce quartier n'est pas fondée. Cependant il reste que cette réputation pèse sur des individus et des familles qui adhèrent très largement aux modèles culturels des classes moyennes et de la culture de masse. Le sentiment de chute, de pauvreté relative, de fragilité s'impose à près de la moitié de la population. Ce n'est pas le cadre de vie qui pose un problème, il s'agit plutôt de la situation sociale stigmatisée des personnes appartenant aux classes moyennes prolétarisées et dépendantes. L'auteur met en exergue dans quelle mesure la définition de soi bloque la formation d'une culture et d'une communauté populaires quand chacun se range et cherche à se démarquer des autres dans un mécanisme de ségrégation auto-produit. Ceux qui développent des liens plus communautaires sont souvent rejetés parce qu'ils participent de la stigmatisation du quartier, même quand celle-ci est décrite comme injuste.
Analyse du cas de l'école où l'exclusion se pose en termes institutionnels. A partir du principe d'intégration sociale de l'école républicaine, l'auteur étudie comment avec le processus de massification scolaire l'école se présente de plus en plus comme un marché de filières et d'établissements avec comme corollaire une rentabilté des études déclinante, un phénomène de "qualification négative", une capacité d'intégration culturelle ébranlée et des manifestations de retraits et de conflits.
De la "banlieue rouge" aux "cités de banlieue" la vie et les quartiers ouvriers ont connu de fortes mutations : le déclin de la communauté et du mouvement ouvriers, ont escamoté la "question sociale" au profit des "problèmes sociaux". En l'absence de conflit social intégrateur, la dualisation sociale sépare les "inclus" des "exclus". Les auteurs examinent ici en particulier les effets de ces transformations sur les jeunes, et notamment les générations issues de l'immigration.
Hier, creuset d'une culture ouvrière liée aux valeurs industrielles triomphantes, la banlieue d'aujourd'hui est devenue l'univers de la «galère» : une machine à fabriquer des exclus qui cherchent-et trouvent-dans la bande de Jeunes tantôt un lieu d'affirmation identitaire, tantôt une école de délinquance et de violence.
Parallèlement à une forte assimilation culturelle, les générations issues de l'immigration connaisent pour la plupart un faible niveau d'intégration sociale dû essentiellement au chômage. Situation paradoxale qui constitue le problème social majeur de ces jeunes, qui engendre aussi ses conduites de crise, reproduisant la logique de dualisation et d'exclusion dont ils sont victimes.
Les problèmes de l'immigration s'inscrivent en France dans des logiques sociales qui sont des logiques de marginalité. C'est ainsi que l'on peut analyser l'exclusion sociale des jeunes qui fabrique une identité culturelle pour résister à la ségrégation économique. Cette marginalisation pourrait déboucher sur la construction de minorités ethniques sur le modèle anglo-saxon, ce qui aurait des conséquences beaucoup plus dangereuses du point de vue de l'identité nationale.
L'auteur met en évidence les déséquilibres qui existent entre les trois processus migratoires que sont l'intégration sociale, l'assimilation et la participation politique.
Ce bilan qui fait le point sur la connaissance sociologique et la recherche sur l'immigration en France distingue les processus sociaux suivants : intégration, assimilation, identification nationale et participation politique.
Hors des catégories de la sociologie classique, de la délinquance, la galère est une action de classe dangereuse faite de désintégration, d'exclusion sociale et de rage. Cet essai sociologique restitue l'expérience de la galère à travers l'expérience de jeunes immigrés en France.
La force de SOS Racisme a été de socialiser l'opinion (notamment les jeunes) autour de la protestation sur l'antiracisme. Mais ce mouvement doit aussi préserver son autonomie et trouver des thèmes ou des projets propres. Mais la soudaineté de la vague soulevée par «touche pas à mon pote» ne doit pas cacher la fragilité, ni les limites d'un mouvement d'opinion, car la question essentielle est celle de l'intégration et des risques de société duale.
Evaluation du programme anti-été chaud en faveur des jeunes des banlieues. Ce programme est un des volets de la politique intégrée de prévention de la délinquance juvénile conduite après 1982.