L'auteur s'efforce à partir des sources mises à sa disposition d'intégrer les divers aspects du mal-être actuel des banlieues tout en s'interrogeant sur ses origines.
En août 1893, dans les salins d'Aigues-Mortes, une rixe opposant des ouvriers français à des ouvriers immigrés italiens se termine par un massacre. A l'origine de cet affrontement meurtrier, se trouve le problème de la «protection du travail national», de la «préférence nationale». A partir des articles de presse, des rapports de gendarmerie et des comptes rendus de procès, l'auteur retrace les faits, puis en démonte habilement tous les mécanismes. Il replace la tuerie au coeur des passions et des fantasmes xénophobes qui, de Sedan à l'affaire Dreyfus, agitent la nation française. Discours cocardiers et nationalistes - parfois radicalisés par les rivalités coloniales - prônent alors la chasse à l'Italien, aux nouveaux «Sarrasins» qui «volent le pain des Français». Alimentée par une italophobie grandissante, émerge ainsi, au-delà de tout clivage politique, la «question des étrangers». Les tragiques événements d'Aigues-Mortes, véritables symptômes d'une société en crise et en quête de boucs émissaires, mettent en évidence la nature des phénomènes d'exclusion et de rejet de l'étranger qui perdurent souvent aujourd'hui.