Dans ce livre novateur nourri d'enquêtes menées depuis plusieurs années sur les deux continents, Jocelyne Césari présente les transformations de l'autorité islamique liée à la condition minoritaire, ainsi que l'influence des formes mondialisées de l'islam, wahhabites et Frères musulmans, sur les débats théologiques et la lutte pour l'imposition d'une orthodoxie islamique. A l'opposé de ces forces conservatrices et parfois réactionnaires qui attirent certains musulmans d'Europe et des États-Unis, elle décrit aussi l'émergence d'une nouvelle élite intellectuelle et religieuse, plus ouverte et partie prenante des débats majeurs (démocratie, droits de l'homme, statut de la femme...) qui agitent le monde musulman aujourd'hui. (Extrait de la présentation éditeur)
Les marchands, immigrés, colporteurs ou entrepreneurs décrits dans ce livre présentent la double caractéristique d'être à la fois "transnationaux" et "indigènes. Dans l'anonymat, ils déploient au quotidien des formes d'action en s'appuyant sur des ressources culturelles qui ne sont pas celles de la culture Coca-Cola mais qui n'en sont pas moins efficaces. Ils font en quelque sorte partie de la face cachée de la mondialisation, plus difficile à "investiguer" que le monde des institutions en raison du caractère fluide, polymorphe et souvent informel des activités transnationales.
Exposé des principaux regroupements musulmans en France avec leur origine, leur consistance, leur orientation) ainsi qu'un point sur le problème délicat de l'évaluation du nombre de musulmans présents sur le territoire français.
La dynamique d'incorporation des populations immigrées dans l'espace européen s'accompagne d'une nécessaire adaptation de l'islam au contexte européen. Cette adaptation est dans certains cas un processus de sécularisation des références religieuses, dans d'autres cas un retour aux sources de la tradition islamique qui peut prendre des formes radicales. Deux défis sont particulièrement centraux dans la creation d'un islam européen: d'une part la collusion entre islam, ethnicité et pauvreté qui se produit dans certaines parties des espaces urbains européens, d'autre part, l'absence d'un renouveau théologique significatif et l'émergence d'une élite religieuse européenne.(Résumé de l'auteur)
Les résistances à considérer l'islam comme l'une des composantes du paysage religieux et culturel français se sont incontestablement atténuées pendant la décennie 1990, en particulier au niveau local. L'inscription d'une vie communautaire islamique dans l'espace urbain (correspondant au passage des salles de prière, souvent invisibles et anonymes, à la mosquée), comme dans les autres pays européens d'immigration ancienne, ne suscite plus de résistance ouverte. Deux raisons peuvent être invoquées pour expliquer cette acceptation progressive. Tout d'abord, la politique du ministère de l'Intérieur par le biais du bureau des cultes a comme objectif depuis 1989 d'ériger l'islam en minorité confessionnelle reconnue par l'Etat. Le second élément à prendre en compte dans la réduction du conflit autour des mosquées est l'émergence d'une nouvelle génération de leaders. Les cas de l'islam à Marseille et Toulouse illustrent cette évolution récente. Dans les deux villes, le projet d'une grande mosquée stagne depuis longtemps. Dans les deux villes, la situation est en train d'évoluer en raison de l'émergence des élites musulmanes dans un débat longtemps dominé par les représentants de l'islam immigré. A Marseille, après la période de résistance à la construction d'une mosquée durant « l'ère Gaston Defferre », la logique dominante depuis 1989 est celle de la consultation de toutes les tendances au sein de la population musulmane locale afin de faire émerger un relatif consensus sur la construction de la future mosquée. A Toulouse, la négociation demeure fragmentée entre le pouvoir municipal et les principaux leaders islamiques.(Résumé des auteurs)
Aujourd'hui, l'alchimie sociale de Marseille intrigue et suscite de nombreuses questions. Pourquoi, avec un taux de chômage proche du double de la moyenne nationale, et des milliers de familles sous le seuil de pauvreté, la ville n'a-t-elle jamais explosé ? Comment se fait-il qu'il n'y ait pas de banlieues ? Pourquoi l'intégration des immigrés semble s'y passer plutôt bien ? Comment finalement se résolvent les tensions sociales ? A partir de plusieurs enquêtes de terrain, les auteurs tentent de répondre à ces questions, et dégagent les caractéristiques de la communauté marseillaise et de sa culture locale. (Présentation de l'éditeur)
La prise de conscience que l'islam est la deuxième religion de France date des années 80, date à laquelle les lieux de culte ont émergé dans l'espace public ou les quartiers. Aux salles de prière organisées dans un cadre associatif ont succédé quelques constructions de mosquées plus visibles et qui suscitent moins d'hostilité depuis 1990. Même si la question de la représentation de l'islam français qui n'est pas parvenu à se fédérer autour de la Mosquée de Paris n'est pas réglée, on assiste à une sécularisation et à un repositionnement de l'islam dans l'espace privé qui témoigne de l'adaptation d'une religion transplantée et d'une reconstruction de l'identité religieuse chez les jeunes musulmans.
La mondialisation, ce maître-mot désignant l'ouverture croissante des marchés nationaux aux exigences du commerce international, est souvent définie comme l'étape ultime de l'avènement de l'économie de marché. Ce terme opère cependant encore souvent comme cliché, sorte de « mot-valise » sollicité en dernière instance pour évoquer plus qu'expliquer les transformations en cours. En outre, parmi les acteurs de cette mondialisation, on oublie trop rapidement les marchands, immigrés, colporteurs, entrepreneurs, acteurs religieux, qui constituent en quelque sorte la face cachée de la mondialisation. Ce sont les formes d'action déployées par ces acteurs, au quotidien, dans l'anonymat, que décrit et analyse cet ouvrage.
Les adolescents immigrés se voient plus différents de leurs parents en exil en France que ne le sont les jeunes Français par rapport aux leurs et plus particulièrement en ce qui concerne l'islam.
L'islam devient de plus en plus une dimension constitutive du champ spirituel et idéologique de L'Europe. A partir de son insertion dans plusieurs pays européens, on peut envisager les diverses modalités de reconnaissance : intégration ? Laïcité plurielle ? Comment ces évolutions sont-elles vécues au niveau de la construction identitaire chez les jeunes ?
L'auteur met en garde contre toute forme totalisante qui enferme la personne, dès lors qu'elle se dit musulmane dans toutes sortes de représentations négatives et souligne la nécessité de prise en compte de cette personne avant tout en tant qu'individu. Elle met également en garde contre les dérives médiatiques qui tendent à faire l'amalgame entre islam et intégrisme et qui confondent visibilité d'une pratique religieuse ancienne et retour à l'islam. L'auteur distingue donc l'islam des pères, l'islam "ordinaire" des jeunes" et l'islam engagé qui, selon elle, est minoritaire.
Son intégration passant par une réévaluation du droit culturel, l'islam perturbe l'équilibre entre les trois principes de la laïcité : unité républicaine, respect du pluralisme religieux et liberté de conscience. Mais deux difficultés surgissent : quelle est l'épaisseur morale concevable de la culture publique commune ? Quelle est la base d'un accord public sur les valeurs communes ?
L'islam en France est une religion confrontée à la modernité et en pleine mutation. Si l'on observe la pratique religieuse des générations issues de l'immigration, on constate chez ces jeunes musulmans de banlieue une rupture avec la religion traditionnelle de leurs pères et une quête de spiritualité qui s'apparente à une construction de soi. Loin de l'intégrisme, cette nouvelle identité religieuse qui s'exprime dans les associations ou dans la sphère privée aspire à une reconnaissance sociale que l'on aurait tort de refuser.
Montre en quoi la vision de l'islam est le produit d'une construction européocentrique héritée de siècles d'opposition politique et religieuse fondée sur des stéréotypes et des représentations imaginaires liés au syndrome algérien et au prisme néo-colonial.