A la lumière de leur propre expérience, quatre anthropologues examinent leur confrontation à la violence lors de recherches sur le terrainn, violence qui a pu les atteindre moralement, sinon physiquement. Ils mettent en lumière la difficulté de maintenir une barrière entre affects et neutralité scientifique.
Cet article est le résultat d'une recherche comparative menée sur deux sites, Sarcelles-Lochères et Garges-La Muette, où s'opposent deux logiques de ségrégation, agrégation volontaire et captivité, deux parcours d'immigration, deux types de référence à la France et au pays d'origine (incluant l'origine mythique que représente la terre d'Israël). Le cas de la concentration des juifs à Sarcelles est exemplaire à bien des égards : organisation forte conjuguée avec un émiettement communautaire ; pôle d'attraction et territoire de l'identité. Ce dernier est le résultat de deux types de stratégies : celle des traditionalistes, qui construisent un espace de confiance, prolongement de l'espace d'intégration, et celle des orthodoxes, qui mettent en place un espace de séparation. Dans le quartier de la Muette à Garges-les-Gonesse, les vieux résidents compensent la captivité par leur réseau de connaissances et les jeunes, leur vécu d'un "parcage des immigrés", par des stratégies d'appropriation de l'espace, qu'elles passent par la création de bandes ou par l'entrée en islam.(résumé de la publication)
Cet article se propose de montrer comment les figures du religieux qui se déploient dans l'espace du grand ensemble de Sarcelles, espace de concentration d'une population juive importante et diversifiée, peuvent être analysées comme des figures politiques. Non seulement parce que la construction communautaire, favorisée par l'alliance des élus locaux et la mise en place de certaines orientations des politiques de la ville, est potentiellement porteuse d'un modèle du rapport des habitants aux autorités locales. Les diverses positions religieuses des sujets de l'enquête, si elles sont vécues comme des pratiques collectives de solidarité et de protection, peuvent aussi être analysées comme des réinterprétations des divisions sociales qui traversent le grand ensemble et la population juive.(Résumé de la revue)
Sarcelles, premier grand ensemble de la région parisienne, est aussi le site du développement de mouvements religieux juifs. La construction d'un nouveau lieu de l'utopie se produit dans un contexte de globalisation du religieux, de crise économique et de redéploiement des réseaux caritatifs internationaux de type privé. La figure singulière des juifs de Sarcelles est replacée dans une analyse globale de l'articulation entre politiques publiques, ethnicisation des rapports sociaux, nouveaux modes d'affiliation volontaire, productions symboliques.
Analyse, à partir d'une situation singulière, celle de la ville de Salonique, du système des emboîtements des communautés sur lequel reposait l'administration de l'Empire ottoman.
Le grand ensemble de Sarcelles accueillit, à la fin des années 1950, des juifs d'Afrique du Nord, rapatriés ou immigrés qui contribuèrent à la transformation de la ville. Pour expliquer cette transformation, les juifs de Sarcelles ont recours au mythe fondateur de l'Etat d'Israël conquis sur le désert. Sarcelles est ainsi devenue, peu à peu, le lieu où l'on a reconstruit, relais de l'intégration et bientôt producteur d'une identité urbaine spécifique. Cette visibilité revendiquée est un des atouts de l'affirmation ethnico-religieuse.
Cet article présente un exemple de restitution écrite de matériaux oraux à partir de la construction de la mémoire de migrants juifs de l'Entre-deux-guerres. Le problème de la mise en récit est replacé dans une réflexion plus vaste sur les modes de transcription des phénomènes culturels dans l'approche anthropologique. L'auteur procède à une analyse structurale des récits migratoires qui se présentent comme des fragments formant une chaîne signifiante et exprimant une histoire mythique du groupe.
Cette recherche est une comparaison de deux sites, Sarcelles-Lochères et Garges-la Muette, où s'opposent deux logiques de ségrégation - agrégation volontaire et captivité - deux parcours d'immigration, deux types de référence à la France et au pays d'origine. Le cas de la concentration des juifs à Sarcelles est exemplaire à bien des égards : une organisation forte conjuguée avec un émiettement communautaire; pôle d'attraction et espace de l'identité. Le quartier de La Muette à Garges-lès-Gonesse a connu une évolution différente, avec sa composante musulmane et maghrébine. La ségrégation concerne des populations captives. Mais, pense l'auteur, la force de l'enracinement et le retour au religieux des jeunes contribuent à une revalorisation du quartier.
Le texte analyse les stratégies opérant au sein de la communauté juive du Sentier à Paris, en relation aux formes d'intégration de la société d'accueil. La notion de territoire immigré, dont la longue histoire plonge ses racines dans l'approche anthropologique du phénomène migratoire aux Etats-Unis (Ecole de Chicago), est ainsi présentée. Selon l'auteur, la survivance des aires de ségrégation dans une ville peut s'expliquer par leur capacité à satisfaire les besoins élémentaires et à résoudre les problèmes des populations qui les habitent. Toutefois, la critique des "community studies" a montré que l'existence d'une communauté ne repose pas forcément sur une base géographique. Le recours aux notions de réseaux et d'appartenance permet alors de penser l'immigration en terme de systèmes ouverts, hétérogènes et de comprendre les capacités d'adaptation de différents groupes étrangers.
La période de la guerre du Golfe a mobilisé l'opinion publique française et a pu apparaître comme un moment de cristallisation des positions particularistes des populations juives et arabes. L'article se propose d'analyser ces positions dans un espace commerçant : celui de la Goutte d'Or. Dans ce quartier, qui a accueilli depuis un siècle des populations immigrées, juifs et arabes entretiennent des relations d'échange économique et collaboration. Ce système de relations sociales sert de trame explicative aux réactions des commerçants et habitants de la Goutte d'Or pendant la guerre du Golfe. Elles font preuve, dans l'ensemble de modération et de retenue. Cependant, elles s'expriment différemment en fonction de la place occupée par les différents groupes dans l'espace socio-économique et de leurs rapports respectifs à la nation française.
La spécialisation professionnelle des groupes minoritaires, notamment des juifs est un phénomène qui a eu plusieurs explications historiques. Dans la société féodale de Pologne et dans la société ottomane du XVIe siècle les juifs étaient collecteurs d'impôts, prêteurs ou changeurs. Dans ce cas de figure c'est le rôle d'intermédiaire des juifs entre la classe dominante et la classe dominée qui a été mis en exergue. En revanche, le cas des juifs en pays d'Islam a été examiné comme exemple de relative autonomie par rapport aux normes de la société, favorisant par conséquent leur rôle d'intermédiaires. La spécialisation professionnelle de cette minorité se maintient dans l'histoire. L'ensemble des activités économiques de la communauté juive d'Orient à Paris et sa spécialisation commerciale fonctionnent à la fois comme mode d'insertion et de différenciation.
Dans le Paris de l'entre-deux-guerres s'est installée une population judéo-espagnole, venue de l'Empire ottoman, en plusieurs vagues d'immigration. Le "quartier des Juifs orientaux", situé au sud de la place Voltaire, est marqué par des pratiques d'intégration et de différenciation qui président à l'implantation de cette communauté, aujourd'hui dispersée. C'est l'activité économique - la création d'un espace commerçant - plus que les traditions religieuses et culturelles qui la distingue et l'identifie comme minorité. L'identité des Judéo-Espagnols du XIème arrondissement se cache d'abord derrière la négation d'une mémoire collective, répétée dans chaque parcours d'immigré. Puis elle transparaît à travers le mythe du voyageur aventureux, hors de l'Histoire mais construisant sa propre histoire sur le modèle du séjour instable du commerçant.