Cet article étudie la question de l'identité autochtone en milieu urbain au Mexique. Après avoir montré comment l'expansion industrielle entre 1940 et 1970 a favorisé la substitution d'une identité de classe à l'identité ethnique chez des milliers de nouveaux citadins d'origine amérindienne, l'auteur examine les effets de la stagnation économique qui a suivi et qui, au contraire, a encouragé le maintien des liens avec les communautés d'origine, en même temps que les migrations autochtones se redéployaient sur le territoire, voire au-delà de la frontière des Etats-Unis.
Le soulèvement du Chiapas, en janvier 1994, est venu redonner à la question indienne toute son acuité dans un pays où l'élite tournait le dos au Mexique des autochtones, pour rêver d'intégration au Premier Monde. Depuis la conquête espagnole, la définition officielle de l'indianité était essentiellement une affaire de Blancs mais on redécouvre aujourd'hui comment les peuples amérindiens du Mexique ont réagi à la mise en tutelle coloniale en élaborant ce qu'on peut appeler des cultures de résistance qui reproduisent leur identité distincte, tout en s'appropriant des éléments techniques, politiques et symboliques de source européenne.